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'Hérissoneries'
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6 novembre 2012

Mr Vertigo, Paul Auster


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Nattih_bis

Qui se serait intéressé un jour à Walter, gamin des rues de Saint Louis à la Oliver Twist, cousin de Pip (des Grandes Espérances), si ce n'est Maître Yehudi ? Pas tout à fait orphelin mais assez délaissé par sa famille, ou ce qui en reste, pour considérer le trottoir comme un lieu attrayant, Walt voit néanmoins en son oncle Slim et sa tante Peg un dernier filet à une vie de misère complète. Si le lecteur ne rencontre pas ces deux compères, il voit les conséquences de leurs soins apportés au garçon à travers son état général. Comme maître Yehudi le lui rappèlera bien assez durant les premiers jours, il ne "vaut pas mieux qu'un animal, (il n'est) qu'un bout de néant humain". Et pourtant c'est ce gamin là, à peine âgé de 9 ans, qu'il choisit pour son projet fou, et le lecteur sait déjà comment l'affaire va démarrer de la manière dont l'auteur, dès la première page, se concentre sur ce personnage un brin farfelu ; comment auriez-vous réagi si un homme vêtu de noir s'était penché sur vous, petit mendiant de Saint Louis et vous avait dit le plus sérieusement du monde : "Tu ne vaux pas mieux qu'un animal. Si tu restes où tu es, tu seras mort avant la fin de l'hiver. Si tu viens avec moi, je t'apprendrai à voler". C'est bien ainsi, un peu à la manière de Dickens que commence ce roman tout à fait surprenant et insolite, teinté de magie, et avant tout d'espoir. Espoir de sortir de cette condition, espoir d'une vie meilleure, espoir qu'à deux, de grandes choses seront possibles, combattant toujours, se relevant des coups que la vie leur assénera. Mais nous n'en sommes pas encore là. Le petit Walter est un sauvage, rien de moins qu'un vaurien râleur et méfiant, éduqué par la nécessité, a l'œil vif et calculateur, à la main chapardeuse, et à l'esprit futé

sklover

Quelle petite graine de poussière, tout juste bonne à être écartée des jambes dans lesquelles elle se fourre pour quémander, quel petit animal grossier et insolent ! Un diamant brut et sale, mal dépoli, mais qui sera bien vite capable de prodiges ! Encore une manifestation du REVE AMERICAIN, le grain de folie qui semble loger dans chaque habitant à cette époque, qui, animant toutes ces petites gouttelettes constituant la grande vague, en fait un pays mouvant et allant de l'avant, quoi qu'il advienne; ces prodiges qui émerveillent semblent véritablement emprunts de la culture américaine et s'y intègrent parfaitement : la Grande Crise arrive (1929), et cette magie joue le rôle de baume, d'appaisement, témoigne d'une réalité divine, d'une part de mystère indépendant de l'Humain, une force qui garantit la stabilité du monde. Et pourtant, notre jeune talent, à force d'avoir la tête dans les nuages, ressentira d'autant plus quel poids le retiendra bientôt au sol, inexorablement. Qu'à cela ne tienne, en avant quand même ! L'ascension de Walt est d'autant plus rapide que son caractère ambitieux et un rien flambeur le porte toujours plus haut. Et à un moment, on commence à doucement prendre de la distance et regarder ce héros grimper, malgré les dangers ; on ne le suit pas toujours, on s'interroge, on voit les conséquences avant Walt. Par moments, "my faith", ma foi en ce petit personnage vacillait, je le sermonais intérieurement, je voulais le secouer, lui ouvrir les yeux, lui prendre la main et le guider. Il déraille légèrement, tatonne, aveuglé par des émotions si fortes, qui s'entrechoquent en lui, créent des étincelles ou au contraire noient le tout.

 

Tiffany_Co

"On n'en fait plus des comme ça. Maître Yehudi était le dernier de son espèce, et je n'ai jamais rencontré son pareil : un homme qui se sentait parfaitement à l'aise dans la jungle. Il n'y était pas le roi, sans doute, mais il en comprenait les lois mieux que quiconque : qu'on lui défonce l'estomac, qu'on lui crache à la figure, qu'on lui brise le coeur, il réagissait aussitôt, prêt à affronter tout ce qui se présentait. Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Ce dicton, il ne faisait pas que le vivre, c'était lui qui l'avait inventé." 

 

Rony_GN

J'ai adoré suivre cet anti héros si attachant, plein de vitalité, ce fut un vrai bonheur de le suivre dans son apprentissage, puis dans sa quête, brulant la vie par les deux bouts. Walt en sortira grandi, digne et fier, respectable et droit. Pourtant, dans cette Amérique où sévit le Ku Klux Klan, pays du base-ball, des gangsters, et du cinéma, terre des malfrats, terre de l'espoir, où tout est possible pour ceux qui sont assez effrontés, forts, ou simplement fou pour y croire, ce petit garçon aura à courir vite, à semer son talent dans le cœur des gens, pour ensuite voir briller le succès dans les yeux de ses spectateurs. Il évitera les crevasses, s'accrochera quelque peu, s'égratignera à la vie, mais, brave, notre petit galopin méritera son nom, et c'est avec fierté que le lecteur, si proche est-il de 'cet animal' pourra considérer celui qui restera en dépit de tout Walt le prodige comme son ami d'encre, son petit moi sauvage et âpre, courageux et malin, son compagnon fictif. A mesure que le temps passe, notre personnage s'émousse quelque peu, sa vie s'effiloche, il y a un petit peu de Dexter (de Un Jour) en lui. Mais la fin me réconcilie définitivement avec lui, elle est sublime d'humanité.

 

"Tu es capable de faire tout ce que tu veux. Du moment que tu t'y appliques, qui sait jusqu'où tu peux aller ?"

 

HarrysWife

A travers cette étrange histoire, nous découvrons l'Amérique des années 20, puis 30,  une Amérique en plein essor : New York voit déjà son rôle de plaque tournante artistique bien ancré dans les moeurs, Broadway au coeur de la Grosse Pomme. Et la Californie, si lointaine, est terre de tous les paris, comme de toutes les (dés)illusions. De tournées en tournées, d'escapades et d'échappées, nous traversons tout le pays, dans des ambiances différentes, des humeurs qui colorent chaque voyage et le rendent tour à tour mélancolique, nerveux, empli de rage ou d'espoir. Le calendrier s'effeuille, les jours, les années passent, arrive la Crise, la Guerre, qui assombrissent le monde, arrivent les problèmes, et les secousses, et dérive le bonhomme, dérive...Mr Vertigo sera un peu son Mr Hyde, le vertige le guette, mais on le sait déjà, si sa vie sera une suite d'épreuves, la maturité saura aplanir son existence, comme en témoigne le ton de voix du narrateur...narrateur, Walter à plus de 70 ans

 

mmariaaa

"Nous vivions autrefois dans un monde différent (...). Nous ne sommes plus aussi coriaces que nous l'étions, et peut-^tre le monde en est-il devenu plus habitable, je ne sais pas. Mais je sais qu'on n'a rien pour rien, et que plus ce qu'on désirest grand, plus il faut payer pour l'avoir."

 

J'ai tout simplement passé un très bon moment avec lui, j'ai adoré rencontrer tous ces personnages, sauter de péripéties en péripéties et ne jamais m'ennuyer, me sentir triste puis joyeuse aux côtés de Walt, de maître Yehudi, de Mrs Witherspoon et de tous les autres, qui restent dans mon esprit et même dans mon cœur.

Plaisir de lecture : 9,4/10

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Commentaires
A
Dis donc, il a l'air très chouette ce Mr Vertigo ! :-D J'aime bien la comparaison avec Dickens, que je relis justement en ce moment.
M
Ce serait un bon roman pour les enfants d'aujourd'hui qui se sentent mis à part comme ceux avec des Troubles de comportements. Je ne sais pas comment vous dites en France..
M
On dirait un 'Mode d'emploi' comment se construire une bonne estime de soir? Il a l'air intéressant ce livre! Une belle idée de roman :)
M
Ca fait longtemps que je n'ai pas lu d'Auster, j'en ai quelques-uns dans ma PAL et j'espère que je pourrais bientôt plonger dans l'amérique d'Auster...
F
J'avais étudié Auster à la fac, en cours d'anglais, mais pas ce roman-là. <br /> <br /> Vu ton avis très positif, je le garde en mémoire pour un futur achat ! :-)
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